7 ème épisode saison 2013 : « La Cambrousse » du Menestrail de Moncontour (33 km ; 1200 mètres D+)

Quand courir devient un calvaire : souffrance et douleur dans la cambrousse costarmoricaine à Moncontour

Menestrail image

Il y a trois ans, souvenez-vous, je m’étais déjà rendu dans la petite cité médiévale costarmoricaine de Moncontour pour participer au redoutable Menestrail. J’avais alors pris part à l’épreuve de 24 kilomètres comportant 800 mètres de dénivelé positif. Malgré quatre derniers kilomètres atroces la faute à une fringale, je gardais un bon souvenir de cette épreuve de part son parcours sélectif, son cadre rustique, et de son atmosphère conviviale notamment à l’arrivée. Voilà pourquoi cette année, en compagnie d’Aurélien, je m’étais engagé sur une distance supérieure (33 km) et davantage corsée (1 200 mètres de D+) avec comme objectifs de réaliser une meilleure performance qu’il y a trois ans et également de prendre ma revanche sur mon acolyte qui m’avait devancé sur le cross Nantes Réalités de la Chantrerie. Malheureusement, je n’abordais pas ce défi dans les meilleures dispositions. En dépit d’une forme croissante jusqu’à la mi-novembre, j’ai du baisser le pied ces derniers jours la faute à une douleur au genou intervenue au lendemain d’une sortie longue. Lors du cross Nantes Réalités, je n’avais pas tellement été gêné mais je craignais que la longueur et la rudesse du Menestrail réveillent cette gêne tendineuse. 

Début de week-end costarmoricain et avant course 

Il était un peu plus de 15h00 lorsque je pris la route au volant de ma Peugeot 207. Après un arrêt du côté de Saint Joseph de Porterie pour prendre Aurélien, nous avons mis le cap sur les Côtes d’Armor. Le trajet se déroula sans aucun soucis notable, le trafic étant fluide et la météo assez clémente. Nous sommes arrivés dans la zone hôtelière de la Hazaie, où se trouvait notre pied-à-terre, vers 17h15. Nous l’avons trouvé sans aucune difficulté puisque c’était tout de même la quatrième fois que je posais mes valises dans cet hôtel formule 1 jouxtant la nationale 12 près de Saint Brieuc.

Une fois nos affaires déposées, nous avons été faire quelques provisions alimentaires en vue de la soirée et du petit déjeuner du lendemain. La fin de journée fut calme dans une ambiance joviale. Au menu : le début de la saison 1 de Californication, en guise d’amuse bouche suivi d’un divin repas à base de pâtes avant de passer aux préparatifs de nos affaires pour le Menestrail. Vers 23h30, il fut grand temps de se coucher puisque le réveil était prévu pour 5h15 le lendemain matin. Cependant, le bruit extérieur couplé à l’adrénaline de la course et à l’heure relativement peu tardive pour un samedi soir firent qu’il fut difficile de trouver le sommeil immédiatement.

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Aurélien et moi-même à une dizaine de minutes du départ (photo perso)

Comme convenu, le réveil sonna aux aurores en ce premier jour du mois de décembre. Malgré une courte nuit, je n’avais pas la sensation d’être fatigué. Malgré un réveil un peu plus délicat, Aurélien était également d’attaque pour en découdre avec le Menestrail. Vers 6h10, nous prîmes la route en direction de Moncontour dans l’obscurité la plus totale. Il faisait assez froid (2°C) mais le pare-brise de la voiture n’était pas gelé, heureusement car nous étions un peu juste au niveau du timing. A 6h35, nous arrivâmes sur le site du départ. Les voitures étaient déjà très nombreuses tout comme les coureurs munis de frontales. De suite, nous avons pris la direction du lieu du retrait des dossards car le temps pressait un peu.

Petit point concernant l’équipement pour cette épreuve. Au vu de la fraîcheur ambiante, j’avais opté pour un collant long ainsi qu’un t-shirt à manche longue en plus de l’indispensable paire de gants et d’un bonnet. Du fait de la longueur du trail, j’avais également emporté avec moi un petit sac à dos avec une réserve d’eau de 1 litre et de multiples provisions solides (barres de céréales, pâtes de fruits et gels énergétiques) afin de pallier tout risque de fringale.
Ce point matériel fait, revenons à la course. Après un rapide briefing dans la salle de sport, les coureurs furent invités à rejoindre la ligne de départ située à l’extérieur du gymnase sur la vétuste piste d’athlétisme de Moncontour : le départ était alors imminent !!

Un début de course relativement prudent

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Le profil très escarpé de la Cambrousse (photo https://menestrail.wordpress.com/)

Avec Aurélien, nous étions placés dans le premier quart d’un peloton constitué d’un peu plus de 400 âmes . Petite déception personnelle en ce qui concerne l’animation au départ puisqu’il n’y eut absolument rien, même pas un peu de musique ou des jeux de lumière comme l’on en retrouve régulièrement sur les trails. Cela étant dit, c’est peut-être dû au fait que le Menestrail souhaite rester fidèle à sa réputation de trail très rude sans trop de fantaisie. Bref, c’était parti pour quelques heures d’effort. Au fond de moi, j’espérai faire autour de 3h30 bien qu’il soit toujours complexe d’estimer un chrono sur une épreuve nature comportant autant de dénivelé.

Comme convenu, nous prîmes un départ assez tranquille malgré le profil descendant qui nous conduisit dans les typiques ruelles du village. Après une dizaine de minutes « d’échauffement » dans Moncontour, on entra subitement dans le vif du sujet : à la sortie du village, une zone herbeuse très humide suivie d’un abrupte coteau boisé étaient au menu. Du fait de l’étroitesse du chemin, cela bouchonna quelques minutes avant de se fluidifier. En termes de sensations, je n’étais pas trop mal, mon genou ne me gênait pas encore et de fait dans un autre passage escarpé je décidai de hausser un peu l’allure qui me semblait trop lente à ce stade de la course. Conséquence de cette légère accélération, je perdu Aurélien dans l’obscure forêt que nous traversions: ma course était véritablement lancée.

Un bon rythme jusqu’aux environs de la mi-course 

Si les hectomètres suivants furent relativement roulants voire même descendants, de nouvelles difficultés ne tardèrent pas à se profiler. Vers le quatrième kilomètre une longue côte que je gravis en alternant marche rapide et course était au programme. Le parcours était très cassant avec de véritables montagnes russes à escalader et à descendre : ce n’était pas de tout repos qui plus est de nuit. En dépit du temps sec de ce dimanche, la boue et les flaques d’eau étaient légions rendant les appuis plus précaires et l’on était pas à l’abris d’une glissade. La vigilance était donc de mise ! Toujours dans la pénombre, je maintenais une allure raisonnable tout en prenant le soin de m’alimenter et de m’hydrater de manière régulière. Cependant en dépit de ces efforts, je craignais que mon genou soit un trop grand handicap car progressivement je sentais la douleur croître. J’avais véritablement l’impression de courir avec une épée de Damoclès au dessus de la tête.

Vers 8h15, le soleil se levait paisiblement. Pour ma part, ce fut l’un des moments les plus agréables de la course. Dans un cadre bucolique de collines boisées et de landes, je vis l’astre solaire pointer le bout de son nez au travers de fines nappes de brouillard qui annonçaient une journée ensoleillée. Quelques minutes plus tard, j’atteignis le premier ravitaillement (kilomètre 11), où je coupai complètement mon effort afin d’enlever mon bonnet et ma frontale et aussi de prendre quelques provisions solides et liquides fournies par l’organisation. En repartant, mon chronomètre indiquait 1h25. Ça me paraissait lent mais au niveau du classement je devais bien me situer probablement autour de la 50 ème place.  

Une chose est certaine ce ravitaillement me fit beaucoup de bien. J’avais moins mal au genou et ces quelques victuailles m’avaient redonné de l’énergie.  De fait, durant les quatre ou cinq kilomètres suivants, mon rythme fut plutôt bon ce qui me permis de revenir sur un groupe de trois coureurs avec lesquels j’ai couru jusqu’aux environs du 18 ème kilomètre. Le parcours très vallonné dessiné en plein cœur du Massif Armoricain était toujours aussi agréable et selectif. Mais malheureusement plus les kilomètres avançaient, moins je profitais de ce tracé la faute à une douleur qui ne cessait de progresser …

Moncontour côte

L’une des nombreuses côtes du parcours (photo https://menestrail.wordpress.com/)

Les premiers signes du déclin 

Les deux heures de course étaient passées depuis déjà quelques minutes. Tant bien que mal, je parvenais encore à limiter la casse malgré mon genou douloureux. Je commençais à me faire dépasser mais je maintenais une allure relativement honorable. Dans les côtes, portions dans lesquelles j’avais moins mal, j’étais même bien meilleur que la plupart de mes compagnons de route  mais dès lors que le profil était plat ou descendant, je peinais et luttais contre la douleur. Néanmoins, je me demandais combien de temps j’allais tenir comme ça. Allais-je pouvoir aller au bout de l’épreuve ? 

Courir (ou plutôt marcher) contre la douleur : un interminable calvaire de plus d’une heure et demi 

Bien sur dans ma tête, il était impensable d’abandonner car ce n’est pas dans ma nature de laisser tomber.Et puis malgré la douleur, j’étais toujours devant Aurélien ce qui me motivait quand même un peu. Enfin j’espérais, au fond de moi, que mon genou me laisse tranquille sur le dernier tiers de la course. En tout cas, j‘attendais avec une très grande hâte le second ravitaillement situé au kilomètre 24. Je l’attendais car à son emplacement il ne resterait que neuf kilomètres d’effort et surtout de galère. J’atteignis ce dernier après 2h55 de course. Ce fut un premier grand soulagement et je pris trois minutes de pause pour refaire le plein d’énergie et ainsi que quelques étirements qui n’eurent aucun effet.

J’eus beaucoup de mal à repartir pour ce qui risquait d’être les neuf kilomètres les plus longs de ma modeste « carrière ». Le fait de m’arrêter avait du refroidir le genou et la douleur était insoutenable. Heureusement un passage dans la boue eut le mérite de diminuer temporairement la douleur me permettant de retrouver un peu d’allant durant un kilomètre environ. Mais désormais, c’était un véritable calvaire je ne courais quasiment plus. Et je me faisais dépasser de toute part. Heureusement il y avait encore quelques côtes très raides dans lesquelles je parvenais à limiter les dégâts. Mais ces quelques ascensions ne masquaient pas le torture que je vivais. Je subissais les événements ! Dès que j’apercevais des bénévoles de l’organisation, je demandai des informations sur le kilométrage restant. A l’exception d’une petite portion descendante dans laquelle je suis parvenu à courir à une allure très lente, je n’ai fait que marcher sur les six derniers kilomètres. Et le pire, c’est que même marcher était devenu un supplice sur les derniers kilomètres tant mon genou me tiraillait. Pour passer le temps et garder le moral dans cet enfer, j’essayais de penser à choses positives et à mes amis proches. J’eus même l’envie d’appeler Tom durant l’espace d’un instant.

Malgré tout, une chose me turlupinait : je n’avais toujours pas vu Aurélien me dépasser ! Pourtant, je passais mon temps à me retourner pour voir si sa silhouette ne revenait pas dans mon sillage. Mais rien ! Peut être était-il devant ?

Un dernier kilomètre épique 

Enfin ! On y arrive, je l’aurai attendu ce « putain de village » !!! Au pied de Moncontour, il me restait encore un kilomètre accidenté à parcourir mais j’y étais presque et ce malgré mon genou douloureux. Alors que je m’apprêtais à finir « tranquillement », un événement changea subitement la donne. Alors que j’avais attaqué la montée finale en marchant, tout à coup, j’aperçu Aurélien en train de trottiner en contre bas. Tout au plus, il devait y avoir une minute entre nous deux. Dès lors, deux sons de cloche résonnèrent simultanément dans ma tête : l’un me disait de finir tranquillement sans se préoccuper d’Aurélien tandis que l’autre clamait qu’il serait frustrant de se faire doubler sur le fil par mon acolyte.  
Sans vraiment réfléchir, j’optai pour la seconde option. C’est vrai qu’en dépit de cette « course-calvaire » c’était vraiment dommage de se faire reprendre in-extremis surtout que j’avais une revanche à prendre après sa victoire pour quelques secondes sur le cross Nantes Réalités le week-end précédent.

Dès lors, je donnais les dernières forces qui me restaient et je tentais d’oublier la douleur qui était toujours abominable. Résultat, je marchais comme je pouvais et je trottinais « en canard » car ça me faisait moins mal. Je n’avais aucune allure mais peut importe j’avançais tant bien que mal. A 250 mètres de l’arrivée, dans l’ultime portion difficile, Aurélien était presque revenu sur mes talons et il m’aperçu pour la première fois depuis près de quatre heures. Quel final !!! Alors que nous avions seulement couru dix minutes ensemble, nous étions au coude à coude dans les derniers mètres de cette épreuve de 33 kilomètres. Le mano à mano était à son comble et se poursuivit sur la piste du champêtre stade de Moncontour. A bout physiquement mais surtout mentalement, je détallais comme je pouvais devant Aurélien tel un lapin tentant d’échapper à un chasseur. Aux forceps et non sans mal, je parvins à conserver trois petites secondes d’avance sur mon acolyte. OUF !!!

Je termine finalement cette cambrousse en 4h08’57 » à la 171 ème place après avoir perdu une centaine de places sur les quinze derniers kilomètres. Aurélien se classe 172 ème en 4h09’00 » au terme d’une course qu’il a « bien géré » pour reprendre ses termes. Toutes mes félicitations à Aurélien qui termine à Moncontour la plus longue course de sa jeune carrière ! Petit clin d’œil également à notre ami Mika qui s’était engagé sur l’épreuve du 53 km. Au terme d’une course très rude, il termine après 8h33’54 » d’effort à l’anecdotique 370 ème place. Un résultat certes modestes mais qui prouve une fois de plus son fort mental. Bravo Mika !

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Aurélien et moi-même quelques instants après l’arrivée (photo perso)

Classement 

1 POLIGNE Sylvain 2h53’52

2 PIERRE Sebastien 2h56’58

3 BERNARD Damien 3h03’51

171 CHAPALAN Valentin 4h08’57

172 BREGEON Aurélien 4h09’00

368 coureurs classés / 425 inscrits

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